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Classement du marché des vêtements : éclaircissements sur la démarche et les résultats

Première analyse de l'engagement social et environnemental des marques et distributeurs de vêtements en Suisse.

Eclaircissements sur la démarche et les résultats

La Déclaration de Berne (DB), une organisation qui s'engage pour des relations Nord-Sud plus équitables, et la Stiftung für Konsumentenschutz (SKS), une fondation de protection des consommateurs qui met en avant les notions d'éthique, de santé et d'environnement, sont à l'origine de cette analyse.


Démarche et critères: une étude basée sur la transparence


En décembre 2003, un questionnaire a été envoyé à 34 entreprises du marché des vêtements basées en Suisse. Le but de la DB et la SKS était d'une part d'évaluer la stratégie d'information des entreprises: que savent-elles de leurs fournisseurs, de la provenance de leurs produits, que communiquent-elles à leur clientèle et, tout simplement, quelle est leur disponibilité à répondre à un tel questionnaire. D'autre part on leur demandait de définir leur responsabilité et de présenter leur code de conduite s'il en existe un. Puis, quels labels écologiques sont utilisés comme référence, les principes du commerce équitable sont-ils ancrés dans l'entreprise, etc. Enfin les entreprises avaient l'occasion de fournir de la documentation sur la mise en œuvre et le contrôle du code de conduite ou d'autre mesures (l'identité des organes de contrôle n'étant pas demandée, juste le contenu de leurs rapports). 
Pour compléter ces informations les auteurs de l'analyse ont épluché les sites internet des entreprises et ont rassemblé les informations disponibles par d'autres biais au sujet des entreprises en question: médiatisation de scandales liés aux conditions de travail, de corruption, etc.

Mais une évaluation basée uniquement sur les déclarations écrites des entreprises et sur certaines informations récupérées au passage, a-t-elle vraiment une valeur concrète? Les auteurs affirment que oui et s'expliquent longuement sur ce parti pris (voir le site de la section suisse allemande de la DB, www.evb.ch). D'une part il est vrai que la réalité du terrain ne leur est pas inconnue, grâce notamment au travail de documentation sans relâche fournit par la Campagne Clean Clothes internationale depuis 15 ans. D'autre part il semble cohérent de penser qu'une entreprise qui s'engage sérieusement pour assumer sa responsabilité sociale et environnementale aura aussi de la facilité à rassembler une documentation crédible à ce sujet. Alors que celle qui reste très lacunaire et opaque dans ses réponses a toutes les chances de n'avoir pas entrepris d'efforts importants pour comprendre l'ampleur de son implication dans des enjeux globaux.

Cette analyse doit donc être comprise par rapport à un contexte concret: celui d'une industrie textile mondialisée où depuis quelques décennies la concurrence exerce une pression constante pour baisser les coûts de production et où force est de constater que cette pression se répercute sur les salaires et la santé des travailleuses et travailleurs ainsi que sur les ressources naturelles. La situation est toujours aussi alarmante aujourd'hui et, pour reprendre les termes des auteurs de l'analyse, on ne se demande pas quelle entreprise fait partie du problème, car elle le font toutes. La question est déjà de savoir qui œuvre à trouver des solutions.


Entre les pionniers et les tire-au-flanc, la lente évolution vers une prise en main par les entreprises de leurs responsabilités


Sur les 34 entreprises auxquelles s'adressait le questionnaire, cinq ont été éliminées car elle n'étaient pas de taille ou de structure comparable aux autres (ceci inclus aussi certaines marques qui produisent tout en Suisse). Sur les 29 entreprises restantes la quantité d'informations et de documentation annexes variait assez fortement.
Des résultats très positifs ont été relevés pour la filière du coton bio, domaine dans lequel la Suisse prend, au niveau des ventes, une position dominante mondialement. Remei AG, partenaire de longue date de Coop, ainsi qu'Helvetas et le WWF ont contribué à créer le marché du coton bio. Respectant par la même occasion les principes du commerce équitable (garanties d'achat, prix équitables, projets sociaux, etc), ces distributeurs créent les bases d'une forme commerciale nouvelle et intégrée.
Switcher, l'entreprise basée au Mont sur Lausanne, fournit quant à elle la preuve que la prise en compte des critères sociaux et environnementaux est un facteur de succès commercial. Un travail systématique et rigoureux face aux enjeux sociaux et environnementaux permet à tous les partenaires de Switcher, au Portugal, en Inde et en Chine, d'enregistrer des bilans positifs, et aux produits finis d'arriver sur le marché à des prix tout à fait abordables.
Du côté de la grande distribution, les choses se compliquent un peu. Difficile en effet d'imaginer remonter toutes les filières des nombreuses marques présentes dans les supermarchés. Sans doute on constaterait qu'un certain nombre de fournisseurs ne respectent pas les droits fondamentaux des travailleurs. Mais comme la présente étude ne se base pas sur les faits observables sur le terrain, mais sur l'engagement des entreprises pour y remédier, on arrive quand même à des constats intéressants. Migros joue un rôle de pionnier à l'échelle internationale en ce qui concerne la mise en œuvre de la responsabilité sociale, grâce à son engagement sur le plan de l'application et du suivi de codes de conduites et pour avoir été une des premières entreprises à accepter la publication de rapports de contrôle indépendants. Bien que moins convainquant sur le plan social, Coop a indéniablement une longueur d'avance dans le domaine de l'environnement. Avec 850 tonnes de coton certifié biologique transformé chaque année, elle occupe la position de leader mondial dans le secteur.
La grande majorité des entreprises se situent malgré tout dans une moyenne insatisfaisante. Nombreuses sont celles qui peuvent fournir quelques éléments d'information mais dont l'engagement n'est pas cohérent jusqu'au bout. Ainsi Adidas et Nike, très souvent visées par des campagnes publiques, ont toutes deux adhéré à l'association Fair Labour (FLA) et ont fait effectuer des contrôles indépendants dont elles ont publié les résultats. Pourtant ni l'une ni l'autre ne donne la garantie, dans son code de conduite, d'un salaire minimum de subsistance, ni du droit à un contrat de travail. L'adhésion à un organisme comme l'association Fair Labour ne semble en effet pas être un gage de conduite exemplaire. Le code de conduite réellement appliqué par les entreprises est souvent fort différent de celui préconisé par l'organisation en question. Levi's en fournit un exemple typique en adhérant à plusieurs organisations de surveillance mais en se contentant d'un code lacunaire ne répondant pas aux normes minimales. C&A et La Redoute sont dans des cas semblables, elles se caractérisent par ailleurs par les moyens très importants dépensés pour créer une société de contrôle interne dont les renseignements peinent à sortir.
Finalement il faut remarquer que sur les 29 entreprises faisant l'objet de l'évaluation deux, PKZ et Strellson, ont tout simplement refusé de donner des renseignements.


Suivi et reconduction de l'évaluation

Le point sur lequel les entreprises ne pouvaient pour la plupart fournir aucune information était celui des contrôles indépendants. Une nouvelle évaluation prévue pour 2006 devrait y remédier et fournir davantage de renseignements sur les conditions réelles qui prévalent aux différents échelons de l'industrie textile.
La liste des entreprises devrait également devenir plus exhaustive et les critères de l'analyse être affinés et approfondis. A terme les organisations ayant mené cette première analyse se demandent aussi de qui ce type de travail d'évaluation et de responsabilisation devrait relever. En attendant, elles suivent de près l'évolution des entreprises et encouragent les consommateurs à en faire autant.
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Nicola Dänzer
[29/11/2004]

Liens externes
Déclaration de Berne, section romande.
SKS
Déclaration de Berne, Suisse allemande.
Articles liés
Interview de Florence Gerber, coordinatrice romande de la Campagne Clean Clothes.


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