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Interview de Robin Cornelius, patron de Switcher

Robin Cornelius, l’atypique patron d’une entreprise hors normes, nous dévoile quelques ficelles de la stratégie de Switcher, la marque à la petite baleine jaune qui s’est imposée sur le marché suisse avec ses vêtements produits de manière responsable.

Nice Future: Pourquoi avoir lancé une marque avec une philosophie de développement durable il y a vingt ans, bien avant que cela devienne un argument marketing?

Robin Cornelius:
Lorsque Switcher a débuté, j’allais moi-même en Inde pour trouver des fournisseurs, car je n’avais pas de commerciaux spécialisés dans l’achat de matières premières. En tant que directeur-général, je me dois d’avoir une vision globale du marché dans lequel je travaille et ne peux pas me limiter à ne rechercher que le profit immédiat. A force de fréquenter, au cours de plus d’une centaine de voyages, des personnes pour établir des partenariats commerciaux, il s’avère impossible de ne pas prendre des décisions qui bénéficient aussi à nos partenaires dans les pays producteurs de coton.

NF.: Pourtant, de nombreuses autres firmes ne travaillent pas de manière équitable ?

R.C.: Le problème vient du fait qu’ils envoient des acheteurs et non des décideurs. Un acheteur est formé pour trouver la meilleure marchandise au prix le plus intéressant. Il est formé à négocier le montant d’une vente. Personne ne lui demande de réfléchir aux conséquences de certains mécanismes de commerce, ni d’y trouver des solutions. S’il le faisait, il serait certainement remis en place par ses patrons, car ceux-ci attendent de leurs commerciaux qu’ils obtiennent des tarifs intéressants et non qu’ils aient des idées.

NF.: Pouvez-vous nous parler de votre philosophie d’entreprise?

R.C.: Au point de vue juridique, une entreprise est une personne morale. Il me semble donc logique qu’elle adopte un comportement moral. En le faisant, elle peut mettre en place des stratégies win/win où les deux acteurs y trouvent un bénéfice, plutôt que de se baser sur des rapports de force qui engendrent surtout des problèmes.
L’une des forces de Switcher consiste à avoir un département des ressources humaines qui se centre sur l’humain. Notre service du personnel ne se contente pas d’engager et de licencier les gens ou de gérer la fête annuelle du personnel. Son travail consiste à mettre en réseau les différents partenaires de l’entreprise, afin de créer des synergies bénéfiques à tout le monde. Nous avons donc des gens dont le travail ne consiste pas à rapporter de l’argent mais à améliorer le côté humain de l’entreprise.

NF.: Pensez-vous que Switcher puisse croître sans perdre son âme ?

R.C.: La taille d’une entreprise demeure un paramètre important. Trop petite, celle-ci ne peut influencer le marché et doit se concentrer exclusivement sur l’opérationnel. Elle ne peut se permettre de développer une vision stratégique. Nous avons atteint une taille qui nous permet de créer des postes qui, d’un point de vue comptable, n’engendrent que des coûts, mais qui peuvent se consacrer à influer sur certaines choses selon notre vision. Toutefois, notre marque demeure un petit acteur du marché et même en doublant le nombre de nos usines, nous pourrions toujours rassembler tous nos partenaires autour d’une table et discuter avec eux sans intermédiaire.

NF. : Switcher est associée dans l’esprit des gens au développement durable, pourquoi?

R.C.: Chaque étape de la chaîne de production suit des règles sociales et environnementales, ce qui fait que nos vêtements sont vraiment responsables. En effet, il ne sert à rien d’acheter une matière première développée de manière propre et éthique si on la fait transformer par des enfants esclaves. C’est pourquoi nous avons mis au point des systèmes de vérification et d’amélioration continue de toutes les phases de la production, c’est-à-dire de la culture du coton, du transport, de la fabrication ainsi que de la vente des produits manufacturés.

NF.: Comment fonctionne le suivi du respect de cette politique?

R.C.: Le système se base sur trois piliers. Tout d’abord, il y a notre propre contrôle. Ensuite, toute la chaîne de production est auditée par des organismes extérieurs. Comme nous les payons pour faire ce travail, il n’est pas sûr qu’ils jouissent d’une totale indépendance d’esprit. Afin de palier à cet inconvénient, nous sommes contrôlés par des organisations non gouvernementales, qui n’ayant aucun lien, ni financier, ni d’aucune sorte avec nous, peuvent vérifier en toute indépendance que nous travaillons correctement.

NF.: Après l’association avec Max Havelaar, quelles nouveautés nous réserve Switcher?

R.C.:
Nous élaborons un nouveau label nommé «Respect inside» qui se trouvera à l’intérieur des vêtements dont l’intégralité de la chaîne de production aura fait l’œuvre d’une certification sociale et environnementale. Nous prévoyons également de lancer une nouvelle collection dont le mode de sélection, un peu particulier, sera dévoilé dans un proche avenir.

Alexandre Truffer
[08/06/2005]

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