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Le Miracle Hydrogène ?

L’ancien ministre saoudien de l’énergie, le Cheikh Yamani, a déclaré malicieusement que l’Âge de Pierre ne s’était pas terminé à cause d’un manque de pierre et qu’il en serait de même pour le pétrole et je cite : « l’hydrogène arrive, c’est une question de temps ».

Ces paroles prophétiques pourraient nous faire oublier, un instant, la suprématie actuelle du sombre pétrole et rêver une vie propre, plus harmonieuse et durablement développée. Mais qui est donc ce fameux hydrogène ? Certains n’hésitent pas à parler d’une « économie hydrogène » remplaçant avantageusement notre « économie pétrole » ? Douce utopie ou réalité déjà en marche ?

Les avantages de l’hydrogène sont appétissants car il peut jouer le rôle de carburant en remplaçant l’essence dans votre réservoir. Les conséquences en seraient multiples : au niveau national, n’importe quel pays occidental pétrolo-dépendant ne pourrait que se réjouir de se libérer des fluctuations des prix du pétrole variant selon le bon vouloir de l’OPEP, des grandes compagnies pétrolières britanno-américaines, de l’instabilité du Moyen-Orient, des guerres civiles africaines, des dictatures sud-américaines ou même des démêlés judiciaires russes… entre autres.
Le second avantage pour le moins non négligeable de l’hydrogène est qu’il serait synonyme de disparition dans l’atmosphère de nombreux polluants nocifs, émis par nos voitures, notamment ceux responsables des fameux pics d’ozone estivaux de nos métropoles.
De plus, l’hydrogène est bel et bien la promesse d’une carburant propre, d’une combustion sans CO2. Cela serait un coup massif porté aux émissions de gaz à effet de serre (principalement le CO2) responsables en partie du réchauffement climatique déjà en route.
Pour finir, en terme de logistique, une réserve d’hydrogène et une pile à combustible (moteur fonctionnant à l’hydrogène) remplaceraient avantageusement les batteries actuelles coûteuses, à autonomie limitée et polluantes.

Mais voilà, si l’hydrogène est présent partout sur la terre, il ne l’est pas dans sa forme pure (H2) exploitable, c’est ce qu’on appelle une énergie secondaire.

L’énergie primaire principalement utilisée pour le générer est, c’est amèrement regrettable, le pétrole ou le gaz naturel. Pire, le procédé de fabrication rejette du CO2 ! Ainsi, utiliser des voitures à hydrogène consisterait à déplacer la pollution des villes jusqu’aux centrales de production de H2. Pour couronner le tout, c’est un gaz instable, explosif au contact de l’air, et posant de sérieux problèmes de stockage du fait qu’il diffuse très facilement dans les micro-fissures et qu’il est gazeux à température ambiante.

« Foutu ! » me diriez vous ? Si certains analystes parlent, eux, du « mirage hydrogène », tout n’est pas encore perdu.

La recherche est en plein boom partout dans le monde. Au vu du potentiel de l’hydrogène, on améliore sa production, son stockage et son rendement. L’Islande, est une grande pionnière en ce domaine. Elle fonctionne déjà entièrement à base d’énergies renouvelables. Entièrement ? Non, sauf pour les transports pour lesquels elle importe du pétrole. Elle a donc décidé de progressivement transformer son parc automobile à essence en parc à hydrogène et cela s’est concrétisé l’année dernière par la mise en place, dans une station d’autobus, de la première pompe à hydrogène mondiale. L’Islande est riche en énergies hydroélectrique et géothermique, idéales pour la production d’hydrogène. La Suisse n’aurait-elle donc pas une bonne carte à jouer ?
La Confédération helvétique participe à plusieurs programmes européens de développement de piles à combustibles mais la production reste difficile et même si divers prototypes de bateaux à hydrogène voguent sur nos lacs, la route est encore longue avant une utilisation significative dans notre économie.

Ainsi la prophétie du ministre saoudien est bien politicienne. Jamais l’hydrogène ne pourra remplacer le pétrole pour la bonne est simple raison que c’est une énergie secondaire. « L’économie hydrogène » n’est qu’une figure de style, car cette petite molécule ne peut se substituer que partiellement au pétrole qui règne déjà sur les trois domaines qui fondent notre société occidentale:

- la fabrication des biens de consommation : à peu de chose près, tout ce qui nous entoure est à base d’hydrocarbures (Voir notre article sur ce sujet concocté par l’équipe de NiceFuture ici).

- la production d’énergie : la moitié de l’électricité produite dans le monde provient du trio pétrole-gaz naturel-charbon.

- le transport : c’est uniquement dans ce rôle de carburant que l’hydrogène peut concurrencer le pétrole.

La durée des réserves de pétrole étant estimée à 30-40 ans, le véritable défi énergétique devra être relevé par des nouvelles technologies fondées sur les énergies renouvelables. L’hydrogène est lui un complément, un vecteur énergétique, tout à fait prometteur. Et c’est aussi bien, car faisons preuve de maturité énergétique et ne remplaçons pas un monopole dangereux par un autre !

Grégoire Floch
[15/03/2005]

Liens externes
Office Fédéral de l’énergie
Islande
CNRS
Association Française de l’Hydrogène
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