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A redécouvir, quatre vins d'origine valaisanne

Une aristocrate aux origines vagues, une bourgeoise attachée à son village, une rebouteuse de charme et une vieille paysanne oubliée forment le quatuor vedette de la plus savoureuse des histoires : celle des vins blancs indigènes valaisans.

Le Fendant : un faux valaisan et un vrai envahisseur !

Demandez à quelqu’un de vous citer un vin blanc typique du Valais et l’immense majorité vous répondra le Fendant. Or, l’immense majorité a tort. Le Fendant n’est que le nom régional du chasselas introduit dans la plaine du Rhône en 1847 par les soldats vaudois. Ceux-ci occupèrent le Valais après la guerre du Sonderbund. Dans leurs bagages, ils apportaient un cépage courant sur les bords du Léman : le chasselas. En l’espace de cinquante ans, ce plant importé change de nom, se répand dans tout le canton et devient un symbole de la région. Il s’adapte remarquablement bien aux conditions climatiques particulières et surtout, se révèle beaucoup plus productif et rémunérateur que les variétés autochtones. Ainsi, on déracine et on remplace les cépages d’antan par du chasselas. Les vieux et les grincheux se plaignent que le nouveau venu mette en péril la tradition et que le jus de la treille ne soit plus ce qu’il était. Mais le chasselas produit beaucoup, et chaque année, et avec moins de travail. On laisse donc grogner les nostalgiques et on arrache les vieilles vignes.

Deux mille ans de tradition et de caractère : les spécialités valaisannes.

Cultivées depuis des temps immémoriaux et inconnues hors du canton, la Rèze et l’Humagne blanche, en compagnie de l'Amigne et de la Petite Arvine, peuvent revendiquer le titre de spécialité typique du Valais. Deux millénaires de soins attentifs ont permis aux vignerons de découvrir quels terrains et quels soins se révélaient nécessaires à chaque variété pour donner le meilleur d’elle-même. Le résultat vaut la peine d’être dégusté et la meilleure des caves s’enrichira de l’harmonie d’une Arvine, la douceur d’une Amigne, la vigueur d’une Humagne ou l’originalité fruitée d’une Rèze. Par bonheur, ces vins n’ont pas disparu et depuis une vingtaine d’années, les producteurs valaisans ont redécouvert les spécialités. Les cépages indigènes profitent de cet engouement pour les vins autenthiques et de qualité. Ces petits joyaux œnologiques se trouvent plus facilement sur le marché, tout en gardant cette caractéristique propre aux curiosités que l’on déniche dans une vieille cave tapie à flanc de coteau. Et c’est dans un tel endroit que je suis allé voir pour vous Serge Heymoz, l’un des rares vignerons qui produise de la Rèze dans sa Cave des Sentes.

Un jeune vigneron moderne et un vieux vin rustique.

Dans le patois de l’endroit, les « sentes » désignaient les petits sentiers qui serpentent dans les vignes. Le nom n’a pas été choisi par hasard et une petite route de montagne au départ de Sierre avec tout ce qu’il faut comme lacets à travers les vignes, conduit à la cave. Si l’équipement et la technique sont modernes, Serge vous accueillera dans son carnotzet à l’ancienne avec ses tables en bois massif et les madriers du plafond noircis par l’usage. Après avoir débouché une bonne bouteille, il a bien voulu répondre à mes questions.

NiceFuture: Pour un vigneron quelles sont les spécialités de la Rèze ?
Serge Heymoz : La Rèze est un vieux cépage autochtone et comme tous ces cépages, relativement difficile à vinifier. Tout d’abord, la vigne produit peu, bien moins que les autres variétés, car ce cépage est de type irrégulier, alternant, c’est-à-dire qu’il ne donne du raisin qu’une année sur deux. Ainsi, la moitié de la vigne peut être vendangée alors que l’autre moitié se réserve pour l’année suivante.

NF : Pourquoi alors planter de la Rèze ?
S. H. : La Rèze fait partie d’une tradition qui a tendance à disparaître et en replantant de la Rèze, je cherche à préserver une partie de ce patrimoine valaisan. Je pense que ce vin, qui a de grandes qualités, ne doit pas disparaître.

NF : Comment définir la Rèze ?
S. H. : C’est un vin fin, légèrement résineux, au caractère assez rustique qui contient des arômes de fleurs blanches et de bourgeons de sapin. Mais son goût demeure assez particulier et il ne plaira pas à tout le monde.

NF : Ainsi la clientèle est restreinte ?
S.H. : En effet, les gens qui apprécient la Rèze sont généralement des connaisseurs que charment des vins un peu particuliers. Ce ne sera jamais un vin comme le Fendant qui se trouvera dans tous les bistrots.

NF : Avec quoi boire une Rèze ?
S.H. : On peut l’accompagner d’un poisson ou d’un fromage, mais on peut tout aussi bien la déguster seule et l’apprécier pour ce que c’est.

C’est ce que j’ai fait et je peux vous dire, chers lectrices et lecteurs, que ce vin vieillit particulièrement bien. J’ai eu la chance de dénicher une bouteille de Rèze qui datait de 1979 et c’était une splendide surprise. Alors, à votre santé... et si les vieux, les très vieux vins aux traditions étonnantes vous intéressent, rendez-vous le mois prochain et je vous en dirai plus sur le Vin des Glaciers.

Comment et où se procurer ces spécialités ?

Alexandre Truffer
[01/03/2004]



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