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Interview VIP : François Marthaler

Conseiller d’Etat du Canton de Vaud, chef du Département des Infrastructures et spécialiste du développement durable, François Marthaler est titulaire d’une licence en sciences économiques. Il est aussi membre du comité directeur de Equiterre, partenaire pour un développement durable, secrétaire romand de la fondation PUSCH (Praktischer Umweltschutz Schweiz) et fondateur de La Bonne Combine, atelier de réparations en tous genres.



A. Questions personnelles

NiceFuture : Quel a été votre plus grand moment de bonheur cette année ?
François Marthaler:
De constater l'immense enthousiasme suscité parmi les collaboratrices et collaborateurs de la cellule web suite au déploiement du logiciel libre Typo3 pour l'ensemble des pages Internet de l'Etat de Vaud. Et – mais c'est moins important, bien que cela ait été agréable – les remerciements que m'a adressé l'équipe en question pour avoir été à l'origine de ce choix. Une option avantageuse à tout point de vue: convivialité de l'outil qui pourra être directement pris en main par les services eux-mêmes (sans webpublisher), meilleure couverture des besoins qu'avec l'outil « propriétaire » sélectionné jusqu'ici, synergie et coopération avec l'Ecole romande d'art et de communication (ERACOM) qui exploite le même outil et enfin économie des frais de licence puisqu'il s'agit d'un logiciel libre.

N.F. : Votre truc « bien-être/relaxation » que vous utilisez dans la vie de tous les jours ?
F.M. :
Un trajet quotidien à vélo pour me rendre au département, sorte de flânerie propice à une bonne mise en condition psychique autant que physique.


N.F. : Un espace, un lieu qui évoque pour vous l’harmonie, un havre de plaisir ?
F.M. :
L'arrivée au Pays d'Enhaut un jour d'automne lorsque le soleil tente de procurer un dernier bronzage aux chalets en bois avant la première neige.


N.F. : Un objet que vous aimeriez transmettre à vos enfants ?
F.M. :
Le demi-queue Steinway de 1905 dans lequel j'ai englouti toutes les économies de la famille sur un coup de tête à l'âge de 25 ans.


N.F. : Une valeur que vous aimeriez transmettre à vos enfants ?
F.M. :
L'indépendance d'esprit et la méfiance à l'égard des idéologies, d'où qu'elles viennent. C'est mon petit côté anarchiste!


N.F. : Dans votre quotidien, quelles sont les attitudes "NiceFuture" qui vous motivent ? (manger bio, achats de proximité, déplacements, bien-être, jardinage, équité sociale, placements éthiques, etc... tout ce qui a un rapport de près ou de loin au développement durable)
F.M. :
Je renonce à faire un choix. Il me semble que le développement durable intègre toutes ces dimensions. La grille d'analyse du développement durable me sert aussi à conduire mon action politique, puisque j'ai l'avantage de disposer depuis janvier 2004 au sein de mon département des infrastructures de l'Unité de Développement Durable (UDD).


N.F. : Consom’action, c’est une vision à laquelle vous adhérez ?
F.M. :
Je suis en effet convaincu que chaque action de consommation est en quelque sorte un vote susceptible d'orienter l'offre. Plus fondamentalement encore, je crois que les échanges économiques sont d'abord et avant tout des échanges entre humains. Il est insensé – et je suis économiste de formation! – d'opposer une sphère économique et une sphère sociale, comme si l'une pouvait exister indépendamment de l'autre. Au contraire, j'aime à dire que nous serons réellement sur le chemin du développement durable lorsque la compétition économique se jouera sur les dimensions de la solidarité sociale et de la responsabilité environnementale. J'essaie de contribuer à ce scénario en intégrant les critères du développement durable dans les marchés publics (une thématique qui dépend de mon département).


N.F. : Anticipez le monde de demain : vous le voyez comment ? Ce sera un monde plus égoïste ? Plus ouvert sur les autres ? Plus au moins éthique ? Pourquoi cette vision ?
F.M. :
Comme tout entrepreneur (j'ai fondé une première entreprise à l'âge de 19 ans), je suis un optimiste de nature. Je veux croire en l'Homme et c'est ce qui m'a conduit à la politique. Quoi qu'il en soit, un monde d'égoïstes sans éthique n'a pas d'avenir et ne peut que s'auto-détruire.


N.F. : L’année 2005, une année faste pour vous ?
F.M. :
Oui. Malgré le climat franchement morose lié à l'état des finances publiques dans le canton de Vaud – on ne fait que gérer la pénurie -, nous avons pu enregistrer de nombreux succès et retrouver une capacité à prendre des risques et à nous projeter dans l'avenir.




B. Questions globales


N.F. : Quel est l’événement marquant dans le monde qui vous a touché cette année ?
F.M. :
La flambée des prix du pétrole. Je me suis demandé si les tenants du pic de Hubbert - début du déclin inexorable de la production mondiale prévu pour 2008/2010 – n'avaient pas été encore trop optimistes. Ce n'était probablement qu'une petite alerte cardiaque, mais je reste hanté par l'idée du collapsus! Sur le modèle de la guerre en Irak, j'imagine trop bien la planète à feu et à sang pour la maîtrise des ressources pétrolières. Stupeur lorsque, au mois de novembre dernier, l'Agence Internationale de l'Energie (AIE) annonce une tranquille croissance de la production pétrolière mondiale de 46% jusqu'en 2050. Est-ce pour éloigner le spectre d'une guerre planétaire préventive? Pourtant, une année auparavant, la même AIE apportait plutôt son crédit au modèle du « peakoil »...


N.F. : Qu’est-ce qui vous révolte dans le monde d’aujourd’hui ? qu’est-ce qui vous enchante ?
F.M. :
La violence gratuite et l'idée que des êtres humains puissent en torturer d'autres, sur ordre voire par pure sadisme. Abu Ghraib, Guantanamo... voilà ce qui me terrorise! Aussi longtemps que des choses pareilles existent, rien ne peut m'enchanter.


N.F. : Quelle serait l’innovation (technologique, de comportement, légale....) qui changerait la face de nos sociétés à votre avis ?
F.M. :
Le succès des logiciels libres (open source) pourrait s'avérer déterminant. La General Public Licence (licence GNU/GPL), imaginée par Richard Stallman au début des années 80 pour protéger le code source du futur système d'exploitation Linux, conduit à confronter une logique marchande du savoir à celle de la connaissance partagée, oppose l'accumulation du capital au travers de la compétition sans merci à l'accumulation des connaissances par la coopération et l'échange. Si ce nouveau modèle pouvait s'imposer, il ne fait nul doute pour moi qu'il se diffuserait comme une traînée de poudre à d'autres secteurs économiques, scientifiques ou culturels. Le plus étonnant dans cette histoire, c'est qu'il ne remet pas radicalement en cause le modèle capitaliste: des entreprises très florissantes se développent en misant sur les logiciels libres.


N.F. : Si vous aviez une baguette magique, que feriez-vous pour mettre en place « un monde meilleur » ?
F.M. :
Je ne suis pas certain que nous devions orienter toutes nos forces vers un « monde meilleure ». Songez à Brave new world d'Aldous Huxley! Pensez à toutes les horreurs commises au nom d'un monde prétendument meilleur! Ne s'agirait-il pas plutôt de préserver simplement ce qu'il y a de bon dans le monde actuel? « Cultivez votre jardin! » conseille Voltaire comme morale dans Candide. Faites grandir ce qu'il y a de bon chez vous et tâchez de vous en satisfaire, ai-je envie de dire pour le paraphraser. Car il n'existe pas de baguette magique.


N.F. : Que souhaitez-vous en 2006 ? pour vous ? pour vos proches ? pour le monde ?
F.M. :
Que chacun puisse être libre d'effectuer les petits pas pour se diriger là où il le désire. Se fixer des objectifs et les atteindre, voilà ce qui définit à mes yeux ce bien si précieux qu'est la liberté. Malheureusement, je dois constater que les hommes libres ne constituent pas une majorité sur cette terre. Espérons qu'elle en compte au moins un de plus en 2006!


N.F. : Quelle est votre bonne résolution pour 2006, si vous en avez une ?
F.M. :
Mieux concilier ma charge de magistrat avec ma vie de famille. Mon fils cadet a 17 ans, ce qui en fait un jeune adulte. Pourtant c'est maintenant que les échanges peuvent s'intensifier et qu'une relation père-fils peut achever de se solidifier. Et puis il s'agit aussi de préparer une « vie de couple » avec ma femme Flavie, après 25 ans de « vie de famille » et sachant que, dans ce domaine, rien ne doit être tenu pour acquis.

[20/12/2005]



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